Assurance-vie : un courtier écroué pour une escroquerie à 10 millions d'euros
Christian Loubersanes, courtier en assurances dans la région de Toulouse, est soupçonné d'avoir mis en place une escroquerie à l'assurance-vie en proposant des souscriptions de contrats frauduleuses à des retraités et à ses "frères" de loge maçonnique. Une centaine de victimes est à déplorer. Le préjudice s'élève à 10 millions d'euros.
Christian Loubersanes est mis en examen pour escroquerie et écroué depuis juillet dernier
C'est une affaire dont la franc-maçonnerie se passerait bien. Christian Loubersanes, grand-maître provincial de la Grande loge régulière de France (GLRF), qui compte quelque 150 membres sur Toulouse (Haute-Garonne) et sa région, est mis en examen et écroué depuis juillet 2016, accusé d'avoir escroqué une centaine de personnes dans le cadre de ses fonctions de courtier en assurances. Le préjudice s'élèverait à 10 millions d'euros.
Selon des informations dévoilées par la Dépêche, ce père de famille de 61 ans et chef d'entreprise est soupçonné d'être à l'origine d'une escroquerie financière portant sur des supposées souscriptions frauduleuses aux assurances-vie. Il aurait proposé à des retraités de souscrire à des contrats d'une rentabilité estimée à 9%. De nombreux "frères" de sa loge maçonnique figurent parmi les victimes, mais l'obédience et l'organisation de la GLRF ne sont pas mises en cause dans cette affaire.
Ce que les clients ignoraient, c'est que les sommes versées n'avaient pas pour but de faire grossir leur épargne et qu'elles transitaient sur le compte de deux sociétés, Sabal Management, un spécialiste en conseil de gestion, et Toulouse Dépôt, un spécialiste du stockage de matériel basé à Aucamville, près de Toulouse. La première renflouant les caisses de la seconde avec de l'argent qui partait de manière tierce sur les comptes personnels de Christian Loubersanes.
"Selon le principe classique de la cavalerie financière, les premiers clients, désireux de réaliser un solide placement ont vu un début de remboursement grâce à l'apport des seconds investisseurs, mais les derniers clients de la chaîne ont tout perdu. Certains jusqu'à 400 000€ !", explique le quotidien régional toulousain.
Les locaux de Toulouse Dépôt à Aucamville près de Toulouse. Crédits : Google
Tous les documents étaient remis en main propre, elle lui faisait confiance...
C'est le cas de cette Toulousaine de 50 ans, qui avait effectué six placements financiers depuis 2012 en faisant confiance à M. Loubersanes. Cette somme devait lui rapporter 351.276 euros avec les intérêts, mais il n'en a rien été et elle a tout perdu.
Sur les documents que lui remettait le courtier, elle notait bien que le nom de l'organisme figurant à l'en-tête n'était pas le même que celui inscrit en bas de page. Malgré les explications de Christian Loubersanes, elle décide d'appeler un de ces organismes basés à Paris pour vérifier sa situation. À sa plus grande stupéfaction, elle n'y était pas connue et ne possédait, en réalité, aucun contrat.
Elle contacte le courtier, qui lui répond avoir l'habitude de retirer les contrats des clients pour les placer dans une autre société (Sabal Management). Chacun des documents relatifs à ces placements étaient remis en main propre et la cliente assure n'avoir rien reçu par voie postale. Elle lui faisait confiance pour des raisons personnelles et ne se souvient pas que les chèques étaient libellés à cet organisme de placement.
En juin dernier, elle découvre le pot aux roses et demande le remboursement de ses placements. Elle ne l'a jamais obtenu, malgré un échéancier de rachat de contrat. "J'en ai pleuré toutes les nuits d'autant que 12 personnes de mon entourage ont été lésées dans cette affaire. Je suis inscrite à Pôle emploi. J'ai vendu une partie de mes biens pour vivre. Maintenant, c'est la maison qui va y passer. J'ai déposé plainte et je dois trouver de l'argent pour mes frais d'avocat", confie-t-elle à la Dépêche.
Signalé après avoir été soupçonné de vouloir échapper à l'impôt
Le quotidien fait également état des contestations de l'avocat de M. Loubersanes, Me Simon Cohen, qui conteste toute notion d'escroquerie, tout en avançant un préjudice bien moindre : "la société Sabal a reçu une somme de 3 millions d'euros provenant essentiellement de placements consentis quasi exclusivement par des particuliers. Et il est reproché à Sabal d'avoir escroqué les investisseurs parce que les fonds n'auraient pas été remis à des sociétés de placement. Or, il semblerait que la totalité des chèques aient été libellés à l'ordre de la société Sabal et non pas à l'ordre des sociétés éditant des contrats d'assurance-vie", estime-t-il.
L'arnaque présumée de Christian Loubersanes a été repérée par une enquête basée sur un signalement auprès de la justice. Celui-ci soupçonnait le gérant de société de vouloir échapper à l'impôt sur le revenu.
Si le préjudice de l'opération s'élève, à ce jour, à 10 millions d'euros, impossible pour l'instant de déterminer à quoi ont-ils servi. C'est là même l'enjeu principal de l'instruction. Récemment, l'exclusion de Christian Loubersanes a été prononcée par un grand comité souverain de la GLRF réuni à Aucamville.