Assurance-vie : vers une révolution ?
Alors que les compagnies d'assurances considèrent que le fonds euro en capital garanti n'a plus aucun avenir, certaines tentent d'imposer un modèle plus diversifié à leurs clients. Simple transition ou véritable révolution ?
Aux grands maux, les grands remèdes. Alors que la baisse des taux d'intérêts de la BCE ne cesse d'impacter les compagnies d'assurances, ces dernières cherchent à trouver de nouveaux leviers sur leurs produits d'épargne.
Alors que le niveau du livret A est au plus bas (son niveau est gelé à 0.75% jusqu'en 2020), l'Assurance-vie accuse également une forte baisse de rentabilité. Selon des compagnies comme Allianz et Generali, l'heure est aujourd'hui à la diversification de l'épargne.
Generali lance la révolution
Mercredi, dans les colonnes des Échos, Jean-Laurent Granier, PDG de Générali France, annonçait plusieurs mesures censées remodeler le modèle d'épargne de l'assurance-vie. Pour cela, il s'appuyait sur un constat clair et sans concessions :
« On est entré en terrain inconnu et on se prépare à ce que cela dure, explique-t-il notamment. Nous croyons plus que jamais à l'assurance-vie mais compte tenu de cette situation sans précédent, il faut revisiter le modèle d'épargne. Le modèle de la sécurité absolue, de la liquidité permanente, de la garantie totale et à tout instant du capital, qui est finalement une réplication du modèle du Livret A, est à bout de souffle. Le monde du fonds euros roi est terminé ! ».
En substance, les taux d'intérêts négatifs prolongés imposés par la BCE, poussent les compagnies d'assurance à changer radicalement le modèle d'épargne et notamment celui du fonds euros à capital garanti, certes très apprécié mais également très peu rémunérateur.
Pour cela, la firme compte baisser radicalement le rendement de ses fonds euros. Sous couvert de la pédagogie, Generali veut surtout éviter que ses clients se fassent de fausses illusions sur les rendements possibles de ce type de contrats : « Nous ne voulons pas donner l'illusion qu'il serait encore possible de servir un rendement à 1,50 % pour un contrat en fonds euros alors que le taux sans risque est négatif », explique Jean-Laurent Granier, toujours dans les colonnes des Échos.
Ainsi, Generali entend plutôt orienter ses clients vers l'euro-croissance, un produit à mi-chemin entre le fonds euros et les unités de comptes. Dans les faits, l'euro-croissance permet de protéger son capital qu'à hauteur de 80 à 90 %.
En somme, il s'agit donc d'orienter les clients vers des produits plus risqués, mais également plus lucratif. D'ailleurs, beaucoup de compagnies pourraient bientôt emboîter le pas et suivre la tendance initiée par Generali.
Une tendance qui pourrait se Generali(ser) ?
En effet, la bombe lâchée par un acteur majeur du secteur, qui comptent près de 2 millions de clients en Assurance-vie et 50 milliards d'euros d'encours, pourrait bien faire boule de neige. Et entraîner dans son sillage beaucoup d'autres entreprises.
Ainsi, Allianz France à également annoncé vouloir suivre l'exemple de Generali. Elle aussi compte limiter l'accès de ses fonds en euros. Sylvain Coriat, membre du comité exécutif d'Allianz France expliquait d'ailleurs aux Échos, que « le fonds euros est un vestige d'un passé révolu où les taux d'intérêts étaient positifs et qu'il faut lui substituer un produit qui soit durablement attractif dans le contexte financier actuel. Ce ne peut pas être seulement des fonds euros avec davantage d'unités de compte (UC) ou d'euro croissance ».
En réalité, ces mastodontes ne font que suivre les préconisations, émises à plusieurs reprises ces derniers temps par Bernard Delas, vice-président de l'ACPR (Autorité de contrôle prudentiel et de résolution). Il mettait notamment l'accent sur l'urgence d'orienter les clients vers un autre produit que le fonds euros garantis qui bien qu'en déliquescence continue de drainer l'essentiel de la collecte d'assurance-vie.
Un enjeu majeur donc pour les firmes d'assurance. D'autant que les différentes compagnies ne sont pas toutes d'accord sur la méthode à adopter. Alors que Generali indique vouloir miser un produit comme l'euro-croissance, Allianz estime pour sa part qu'il faudra se diversifier surtout proposer un produit capable de se substituer sur le long-terme au fonds euros et pas seulement l'euro croissance ou des produits plus risqués. Cela pourrait également passer par des bonus de fidélité ou une participation aux bénéfices différée.
Beaucoup de discussions, mais pas encore d'Allianz
Pour l'instant, cette tactique ne fait pas encore l'unanimité. Certains acteurs du secteur n'ont pas encore complétement tirés un trait sur le fonds en euros. Pour eux, la situation actuelle n'est pas aussi alarmante que certains l'affirment. Ils expliquent d'ailleurs que les fonds euros sont suffisamment bien gérés et qu'ils disposent d'assez de réserves pour réussir à diversifier leurs investissements dans ces supports.
Une compagnie comme Mutavie assure d'ailleurs avoir anticipé cette baisse des taux depuis longtemps. Ce qui lui a permis de mettre en réserve plus d'un milliard d'euros d'encours afin de pouvoir vite s'adapter à un changement brutal.
Urgente pour certains, pas si imminente pour d'autres, la révolution de l'assurance-vie semble en tout cas bel et bien enclenchée...