Que cache la fin du billet de 500 euros ?
En 2019, après dix-sept ans d'existence, le billet de 500 € tire sa révérence. Surnommé le « Ben Laden », ce billet a sans doute davantage servi le grand banditisme que le projet européen, et pourtant, il est chargé de symboles. Sa disparition remet en cause la logique même de la conception graphique de l'euro.
Les billets de 500 euros voués à disparaître
Le 27 janvier 2019 restera dans l'Histoire comme la fin de la production du billet de 500 €, en tout cas, pour 17 des 19 banques centrales européennes. Son émission sera définitivement stoppée partout au printemps. Bien qu'il continue d'avoir cours légal, le billet violet est donc voué à disparaître à partir de cette année.
La fin du «Ben Laden »
En moins de vingt ans d'existence, la septième coupure de la monnaie unique est devenue le symbole de l'argent sale. Il est surnommé le « Ben Laden » à cause de sa propension à financer des activités illicites, comme le terrorisme. Le billet violet n'est en effet pas lourd (1,1 g), ce qui le rend très facile à transporter. Un million d'euros ne pèse que 2,2 kg, autrement dit, le poids d'un Chihuahua. On comprend mieux pourquoi les gangsters et autres évadés fiscaux l'adorent.
L'autre inconvénient du billet pourpre est qu'il n'est pas vraiment intégré au circuit économique, sauf en Allemagne et en Autriche. Les consommateurs de ces deux pays ont culturellement tendance à utiliser la monnaie fiduciaire, même pour des gros achats. Le billet de 500 € a d'ailleurs été créé à l'origine pour servir d'équivalent au billet de 1.000 deutsche marks. Logiquement, la BCE a accordé à ces deux États un délai supplémentaire de trois mois pour cesser la production des billets, ceci pour des raisons logistiques.
Vers la fin de l'argent liquide ?
Dans le reste de la zone euro, le billet violet sert surtout aux criminels et à la thésaurisation. Ainsi, la BCE estime que cette coupure représente seulement 2,4 % des billets en circulation, mais 20 % de leur valeur totale. Les 521 millions de billets de 500 € valent en tout aux alentours de 261 milliards d'euros. Sa fin est-elle la première étape vers la disparition pure et simple de l'argent liquide ? En Suède par exemple, la population utilise déjà de moins en moins le cash et préfère régler ses achats via smartphone.
Une récente étude de la Banque de France a aussi montré que dans l'Hexagone, les paiements en espèces sont moins fréquents que dans les autres pays de la zone euro. Surtout, cette même analyse a révélé que les jeunes générations étaient plus adeptes du paiement immatériel que les précédentes. De plus, si l'on pousse la logique de l'arrêt du billet de 500 € pour des raisons de sécurité à son paroxysme, pourquoi ne pas tout simplement cesser la production de l'intégralité de l'argent liquide ?
Une logique artistique revisitée
Avez-vous déjà remarqué que les illustrations présentes sur les billets d'euros font référence aux grandes périodes du Vieux Continent ? L'antiquité pour celui de 5 €, la Renaissance pour celui de 50 €, en passant par l'art gothique pour celui de 20 €. Aucun dessin n'est le fruit du hasard. Alors quand la BCE décide d'arrêter en 2019 l'émission des billets de 500 €, censés représenter la modernité, il y a de quoi se poser des questions sur l'état d'esprit actuel dans l'Union européenne.
La logique artistique qui se cache derrière les billets d'euros, fruit d'un large concours en 1996, est donc amputée d'un de ses aspects essentiels. Le groupe de travail en charge de déterminer les illustrations pour les billets, à l'époque de la conception de la monnaie unique, avait pour ambition de décrire le cheminement culturel européen jusqu'à nos jours pour, entre autres, souligner l'espoir en l'avenir du continent. Que penser donc de l'absence de ce dernier billet de 500 € dans la nouvelle série de billet intitulée « Europe » ?
Car depuis 2013, la gamme des billets est peu à peu renouvelée. La collection sera achevée en mai prochain, avec l'introduction des nouveaux billets de 100 € et de 200 €. Pourtant, les dessins n'ont pas changé. Faut-il en déduire que l'Histoire de l'Europe s'est arrêtée à ce qui est représenté sur le billet de 200 €, c'est-à-dire, au XIXe siècle ?