Le paiement sans contact peine à décoller en France
Si près de la moitié des cartes bancaires en circulation en France permettent désormais le paiement sans contact, son usage est moins répandu qu'ailleurs, selon les acteurs de ce secteur, qui en vantaient les mérites vendredi à Bercy.
Le "sans contact" permet de payer des montants de 20 euros maximum sans composer son code confidentiel.
Acheter une baguette de pain est souvent synonyme de montagne de petites pièces rouges et de temps perdu à faire l'appoint. Pourtant, bon nombre de boulangeries proposent de payer par carte bancaire "sans contact", en passant simplement sa carte sur le terminal de paiement, tout comme le pass Navigo.
Environ 70 millions de transactions ont été réalisées par ce biais en 2014, principalement dans les boulangeries.
Le "sans contact" permet de payer des montants de 20 euros maximum sans composer son code confidentiel. L'option est identifiable grâce à ce pictogramme, figurant sur la carte bancaire :
"L'enjeu ce n'est pas tellement la technologie, c'est plutôt la diffusion des usages", a expliqué Axelle Lemaire, secrétaire d'État chargée du numérique, lors d'une conférence à Bercy vendredi 10 avril. Autour d'elle, tous les représentants des secteurs impliqués étaient réunis : banques, opérateurs téléphoniques, distributeurs et industriels.
"Les Français habitués à taper un code"
Déjà répandu dans de nombreux pays (Australie, Canada, Royaume-Uni, Espagne, Pologne, etc.), ce mode de paiement reste moins développé en France, pionnière de la carte bleue à puce.
Les Français doivent se défaire de 30 ans d'habitude, celle de taper un code
Bruno de Laage, président du conseil de direction du Groupement cartes bancaires CB.
Aujourd'hui, la moitié des cartes, soit plus de 30 millions, sont équipées de cette technologie, selon les dernières données de l'Observatoire du sans contact. D'ici 2016, l'objectif est d'atteindre les 100 %.
Mais seuls 18 % de ceux qui possèdent ces cartes utilisent le paiement sans contact, selon des données du Groupement des cartes bancaires CB, l'une des organisations qui chapeaute ce système.
Trois fois moins de temps à la caisse
Côté commerçants, la diffusion du sans contact a pris un peu plus de retard. 20 % d'entre eux disposent d'un terminal compatible. "1 sur 5, c'est relativement peu", concède Axelle Lemaire. Un taux qui devrait augmenter ces deux prochaines années, pour arriver à 100 % de terminaux sans contact à horizon 2020.
À l'inverse, les enseignes de la grande distribution ont vite compris l'intérêt du système : 60 % de leur parc de terminaux de paiement sont compatibles sans contact. En effet, selon Carrefour, ce moyen de paiement permet de réduire par trois le temps de passage en caisse.
"En Australie, le leader de la grande distribution, Coles, a même abandonné le plafond de 20 euros car aucune fraude n'était constatée", souligne Olivier Piou, directeur général de Gemalto.
"Zéro fraude"
Malgré tout, la sécurité des informations et l'absence de code à taper restent un frein à l'utilisation du sans contact. Certains experts et les associations de consommateurs s'inquiètent du risque de piratage des données, notamment à l'aide d'applications téléphoniques.
"Le taux de fraude n'a pas changé dans les pays où le sans contact est très utilisé", défend Olivier Piou.
C'est beaucoup plus facile de voler un portefeuille dans le métro que de pirater une carte sans contact
D'autant plus qu'en cas de vol, la banque couvre le risque et rembourse intégralement les achats frauduleux, rappelle-t-il.
Prochaine étape, payer avec son téléphone
Encore en phase d'expérimentation, le paiement sur smartphone devrait être la prochaine étape du sans contact. "Aujourd'hui, je vous parle de carte bancaire, demain on parlera de téléphone pour payer", prédit Axelle Lemaire.
Là encore, les chiffres pointent un paradoxe : alors que les Français consultent en moyenne 150 fois par jour leur smartphone, le paiement sur mobile n'a pas connu d'essor. Pourtant, un téléphone sur deux vendu en 2015 est compatible "NFC" (Communication en Champ Proche).
En Pologne, plus d'un tiers des transactions sans contact sont réalisées par téléphone, et non par carte. 2015 sera sans doute l'année du paiement mobile au niveau mondial, les conditions étant aujourd'hui réunies pour une adoption généralisée, selon le cabinet Deloitte.
À échelle nationale, il faudra encore patienter : l'argent liquide reste l'un des moyens de transaction préféré des Français, d'après un sondage Ifop pour la société de transport de fonds Brink's.
91 % d'entre eux préfèrent l'argent liquide à un autre moyen de paiement pour les petits achats du quotidien, révèle l'étude. En boulangerie, les petites pièces rouges ont encore de beaux jours devant elles.
>> Le paiement sans contact en quelques chiffres :
Infographie. Sources : Gemalto, Orange, GIE CB, MasterCard, VISA.