Vers une suppression des frais de notaire et une hausse de la taxe foncière ?
Le gouvernement a reçu lundi un rapport préconisant trente mesures pour libérer du foncier et relancer le marché de l'immobilier. Parmi ces grands axes de réforme, la modification de la fiscalité immobilière pourrait fortement impacter les ménages.
Dominic Figeat Président de l'observatoire régional du foncier présente son rapport lundi 14 mars (Crédit : BoursedesCrédits)
Comment libérer plus facilement du foncier ? C'est tout le sens du rapport remis ce lundi 14 mars à Emmanuelle Cosse, ministre du Logement, et Christian Eckert, secrétaire d'Etat au budget. Parmi les quatre grands axes avancés, l'un pourrait faire beaucoup de bruit, la réforme de la fiscalité immobilière.
Réformer la fiscalité immobilière et foncière
Pour Dominic Figeat, auteur du rapport, mandaté en juillet 2015, le constat est simple, "la fiscalité immobilière actuelle est injuste socialement et présente des inefficacités importantes". Pire, elle encourage la rétention de foncier constructible et pénalise les transactions sur le marché des biens et des terrains à bâtir. En clair, une réforme profonde du système est indispensable.
Il faut doter notre pays d'une fiscalité plus moderne, plus efficace et plus juste socialement.
Dominic Figeat, Président de l'observatoire régional du foncier.
En ligne de mire, trois impôts. La taxe foncière, à payer chaque année et qui porte sur la détention du bien, a représenté un coût 17,2 milliards d'euros en 2014 pour les ménages. Suivent les droits de mutation à titre onéreux (les fameux frais de notaires si mal nommés) acquittés par les acquéreurs, ainsi que la fiscalité sur les plus-values immobilières, acquittée cette fois par les vendeurs. Ces deux dernières taxes portent, elles, sur les transactions. Une imposition des transactions (25,9 milliards d'euros) qui représente à elle seule 40% de la fiscalité immobilière quand les taxes sur la détention atteignent 60% (39,2 milliards).
La taxation d'un bien lors d'une mutation serait en moyenne de l'ordre de 23.500 euros, alors que le coût annuel de la détention avoisinerait les 1100 euros
Dominic Figeat, Président de l'observatoire régional du foncier.
Une situation que le rapport souhaite inverser pour se rapprocher des systèmes mis en place dans de nombreux pays où la taxe foncière est bien plus importante, mais les taxes sur les transactions beaucoup plus faibles.
Les droits de mutation pénalisent le marché
Et pour cause, les droits de mutation très élevés dans l'Hexagone pénalisent l'activité économique et le fonctionnement du marché du logement en diminuant la mobilité résidentielle des ménages. En effet, ces frais renchérissent le coût des transactions immobilières de près de 5,8% du prix de vente du bien. Le rapport note d'ailleurs, que si les départements disposent d'un pouvoir de modulation des taux, tous ont dans les faits choisis de fixer le taux au niveau plafond.
Résultats, pour les ménages, cette taxe introduit un "coût d'entrée très élevé dans les zones tendues, se traduisant par une dégradation du marché du travail et une moindre productivité en raison des trajets domicile-travail plus longs". Qui plus est, les droits de mutation augmentent mécaniquement le coût d'acquisition du foncier tout en réduisant le nombre de transactions réalisées.
Non libéré, le foncier entraine un phénomène de ségrégation sociale.
Emmanuelle Cosse, ministre du Logement de l'Habitat Durable.
Emmanuelle Cosse, ministre du Logement et de l'Habitat Durable (Photo : BoursedesCrédits)
Augmentation de la taxe foncière d'un tiers
Pour lutter contre cette situation, le rapport préconise tout simplement "la suppression, ou a minima la diminution, des droits de mutation à titre onéreux et de la fiscalité sur les plus-values immobilières de cession". Pour les collectivités, ces pertes seraient compensées "en augmentant la taxe foncière sur les propriétés bâties".
"Cette hausse (de la taxe foncière, ndlr) serait de l'ordre d'un tiers et favoriserait les ménages conservant leur logement en moyenne moins d'une vingtaine d'années" ajoute le rapport. Une mesure qui devrait avant tout impacter favorablement les propriétaires jeunes, qui ont moins d'apports.
Pour appliquer équitablement cette mesure, et éviter tout effet d'annonce d'une baisse des droits de mutation qui reporterait à coup sûr les transactions immobilières, le rapport préconise de lisser ce nouveau mode d'imposition sur une dizaine d'années.
Le gouvernement, prudent, choisit la stabilité fiscale
La fiscalité immobilière sert aujourd'hui avant tout les collectivités locales sous deux formes, la taxe foncière et les droits de mutation. Au total, c'est près de 48 milliards d'euros chaque année qui sont encaissés par les collectivités. Or, comme l'analyse Dominic Figeat, "toute réforme de la fiscalité foncière et immobilière modifie l'équilibre du financement des collectivités locales et des intercommunalités, en impactant leurs ressources".
La réforme de la fiscalité est donc bien un "sujet complexe" comme le rappelle le secrétaire d'Etat au budget, Christian Eckert. Un avis partagé par Emmanuelle Cosse, selon laquelle même s'il faut "réformer profondément la fiscalité foncière et immobilière", cette réforme "aura besoin de temps pour être menée". Une telle révolution fiscale ne pourra donc voir le jour que sur le long terme comme l'explique le rapport.