Les discussions sur le fichier positif des crédits tournent en rond
Le Comité consultatif du secteur financier vient une nouvelle fois de repousser la possible création d'un fichier positif des crédits, dans un récent rapport de son groupe de travail. Objectif d'un tel dispositif, lutter contre le surendettement des ménages. De nouvelles solutions ont malgré tout été formulées.
Le fichier positif des crédits a pour objectif de permettre de lutter contre le surendettement des ménages français
Nouveau revers pour le Registre national des crédits aux particuliers (RNCP). Le récent rapport du Comité consultatif du secteur financier, paru en juin dernier, vient une fois encore repousser une éventuelle mise en place d'un fichier positif des crédits.
Prévu en mars 2014, lors de l'adoption de la Loi consommation portée par Benoît Hamon, ce dispositif devait permettre de lutter contre le surendettement des ménages français en inscrivant les crédits souscrits par des particuliers dans un registre unique, mis à disposition des établissements prêteurs. Une bonne manière de vérifier la solvabilité des clients qui ne sont aujourd'hui pas obligés de déclarer à un organisme de prêt les autres crédits à la consommation qu'ils remboursent déjà.
Jugé attentatoire au respect de la vie privée, par le Conseil constitutionnel, le registre avait été censuré quelques jours plus tard. Pour répondre à ces exigences, un groupe de travail réunissant la Banque de France, des professionnels du crédit et l'association de lutte contre le surendettement Crésus avait été formé il y a un an. Groupe de travail qui a rendu son rapport en juin avec de nouvelles propositions.
Un fichier positif "d'alerte", déjà critiqué
Proposé comme solution par le Crédit Mutuel, ce fichier positif "d'alerte" constitue un outil de détection du multi-endettement à la consommation en prévention du surendettement (ODMEC). Il se traduirait par "une réduction de 60.000 dossiers de surendettement par an, soit 300.000 de moins en 5 ans" selon le rapport. Il ferait par ailleurs passer le nombre de personnes inscrites au FICP (Fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers) de 2.700.000 en 2014 à 2.300.000 en 2020. Des chiffres déjà critiqués et revus à la baisse par une partie du groupe de travail.
Grâce à ce dispositif, le "prêteur saurait si le nombre de crédits à la consommation "actifs" du demandeur est inférieur ou supérieur à 4, et, si ce nombre dépasse 4, il aurait accès à des informations précises sur ces crédits" précise le CCSF. L'objectif est simple : éviter "le crédit de trop". Des membres du groupe de travail ont jugé "suffisamment discriminant" le nombre de 4 crédits retenus pour être inscrit dans le fichier. Une vision contestée par la Banque de France.
Autre avantage de ce projet, il répond à un certain nombre des critiques portées par le Conseil constitutionnel à l'encontre du précédent registre national des crédits. Les données personnelles recueillies, sur 10 à 12 millions d'emprunteurs, seraient sensiblement diminuées, et seuls les établissements prêteurs pourraient désormais y avoir accès. En revanche, "la durée de conservation des données de 15 ans au maximum qui est proposée reste extrêmement longue", critique le rapport.
Finalement, le CCSF note que si "l'idée de "l'outil d'alerte" est intéressante dans son principe, la proposition présentée ne semble pas, en l'état, pouvoir passer le cap du Conseil constitutionnel. Il en résulte une marge de manoeuvre très réduite, voire inexistante pour la mise en oeuvre d'un fichier positif qui soit jugé conforme à la Constitution". Au final, le président du groupe de travail recommande au Ministre de ne pas "retenir au stade actuel" les propositions.
D'autres pistes restent encore à approfondir pour une prévention du surendettement efficace et compatible avec les exigences constitutionnelles. Parmi celles-ci, la proposition de la Banque de France d'avoir recours aux derniers relevés de comptes bancaires mensuels en tant que pièce justificative pour toute demande d'un crédit à la consommation supérieur à 3000 euros. L'association Crésus avance quant à elle la possibilité de créer un "fichier positif volontaire pour les emprunteurs et les prêteurs, non géré par la Banque de France."