Des efforts à fournir par les services financiers dans la lutte contre les circuits clandestins
D'après son rapport annuel, le nombre d'informations reçues par Tracfin a augmenté de 18% en 2015. 95% de ces informations sont issues des professionnels de la finance, tandis que les banques en ligne et d'autres acteurs restent en retrait.
Tracfin révèle que 45.266 signalements ont été déposés, un chiffre en hausse de 18% par rapport à 2014 et de 150% par rapport à 2009.
Présent depuis plus de 25 ans, Tracfin est une cellule chargée du renseignement et de l'action contre les circuits financiers clandestins. Rattachée au ministère des Finances, c'est auprès d'elle que les professionnels doivent effectuer une déclaration de soupçons. Il s'agit ici de sommes d'argent ou d'opérations pour lesquelles ils "savent, soupçonnent ou ont de bonnes raisons de soupçonner qu'elles proviennent d'une infraction passible d'une peine privative de liberté supérieure à un an ou participent au financement du terrorisme", rappelle le ministère.
70% des signalements sont issus des banques
Ainsi, dans son rapport annuel sur l'année 2015, Tracfin révèle que 45.266 signalements ont été déposés, un chiffre en hausse de 18% par rapport à 2014 et de 150% par rapport à 2009. Les banques et les établissements de crédit sont les plus actifs quant à ces déclarations de soupçons. A eux deux, ils ont procédé à 31.276 déclarations (hausse de 6%), soit plus de 70% du total.
Cette part révèle des disparités de comportements entre les différents acteurs financiers. "Rapporté au nombre de comptes ouverts, la pratique déclarative des six plus grands groupes bancaires français varie pratiquement dans une proportion de 1 à 2. Dans l'ensemble, les signalements manquent d'analyse et il n'est pas toujours évident de déceler en quoi les opérations déclarées sont suspectes, notamment au regard du profil clientèle et des "habitudes" financières de la relation d'affaire".
De leur côté, les banques en ligne restent en retrait, une amélioration est donc attendue. "Collectivement, les sept banques en ligne ont dressé 313 déclarations au service, ce chiffre reste faible au regard du nombre de comptes ouverts par ces opérateurs, malgré une progression de 27% par rapport à 2014", précise Tracfin.
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Les banques privées sont les mauvais élèves
Egalement appelées à faire des efforts en la matière, les banques privées sont elles aussi en retrait. Pour la cellule de lutte contre le blanchiment, "malgré une augmentation de l'activité déclarative des banques privées (+43% entre 2014 et 2015), les 736 signalements émanant de ces déclarants demeurent faibles en valeur absolue, notamment compte tenu de leur exposition aux risques de blanchiment des capitaux, en raison de la nature de leurs relations d'affaires (non-résidents, personnes politiques exposées étrangères et domestiques...) et des caractéristiques et modalités d'exécution des opérations financières (opérations de montants élevés, demande de confidentialité accrue...)". Ils pointent également des manquements sur la qualité des déclarations adressées par ces banques avec des retards, des absences de justificatifs et d'éléments de connaissance des clients.
En revanche, d'autres acteurs se montrent plus actifs, comme par exemple les assurances. Leur nombre de déclarations à Tracfin a augmenté de 52% à 2.159, entre 2014 et 2015. "Ces résultats chiffrés encourageants résultent en partie d'une mobilisation du secteur depuis plus de deux ans", déclare Tracfin. Néanmoins, des progrès sont également attends sur "le faible nombre de déclarations sur les personnes morales (+7% en 2014 et +6% en 2015)". En effet, même "si les contrats d'assurance vie ne peuvent être souscrits que par des personnes physiques, les contrats de capitalisation sont, quant à eux, accessibles aux personnes morales sous certaines conditions". Le rapport reproche aux assurances de ne pas prendre en compte "les fonds placés par les personnes physiques qui peuvent provenir directement ou indirectement de personnes morales (ex : abus de biens sociaux)".
+176% pour les établissements de paiement
En outre, les établissements de change de devises se sont davantage impliqués avec 1.709 déclarations en 2015 (+50%). "67 changeurs sur 177 recensés au 1er janvier 2015 ont effectué au moins une déclaration de soupçon au cours de l'année : 5 d'entre eux ont contribué à 60,7% des 1.709 déclarations", précise le rapport 2015. Il est rappelé également que depuis le 1er janvier 2016, les changeurs manuels ont l'obligation de récupérer l'identité de la personne pour toutes opérations à partir de 1.000 euros, au lieu de 8.000 euros auparavant.
Enfin, les déclarations effectuées par les établissements de paiement ont progressé de 176% en 2015, soit 4.535 informations. Ils se placent donc second professionnel dans la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. Néanmoins, cette hausse doit être relativisée : "Pour la première fois, les déclarations de représentants en France de Western Union sont comptabilisées non dans les établissements de crédit, mais parmi les établissements de paiement". Ainsi, "93% des déclarations de soupçon sont transmises par le secteur traditionnel des transferts d'espèces contre 7% pour les prestataires de services de paiement pour le compte de tiers". Pour ces derniers, il est encore très compliqué de connaître l'identité des expéditeurs et des bénéficiaires des fonds.