Epargne : la Banque de France incite les Français à prendre des risques
Alors que les Français ont une rémunération de leurs dépôts plus élevée que celle des épargnants européens, le régime du Livret A semble être un frein à la prise de risques dans l'épargne.
L'épargne réglementée reste la plus utilisée par les tricolores.
L'idylle entre les Français et l'épargne continue. Vue comme une valeur sûre, l'épargne réglementée reste la plus utilisée par les tricolores. Le Plan d'épargne logement (PEL) et les comptes à vue sont les plus plébiscités en 2015, selon les chiffres de l'Observatoire de l'épargne réglementée de la Banque de France.
Ces deux types d'épargne ont accumulé 59,7 milliards d'euros l'année dernière. Le PEL pèse, à lui tout seul, 239,9 milliards d'euros d'encours qui le place juste derrière le Livret A qui affiche un encours de 248,7 milliards d'euros.
« Notre économie a besoin d'investissements risqués »
Le taux de rémunération du PEL est la clé de ce succès. Non comptabilisé dans les bilans des banques (contrairement aux dépôts de l'assurance vie), le PEL a permis aux établissements de récupérer des liquidités, "incontestablement l'écart entre les taux et sa rémunération est très significativement élevé", précise avec amertume le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau.
En effet, le taux a été abaissé de 2% début 2015, puis une seconde fois début 2016 à 1,5%, sachant que celui servi aux stocks d'encours total est de 2,8%. A cela s'ajoutent les taux réglementés du Livret A, du livret de développement durable (LDD) et du livret d'épargne populaire (LEP), qui tirent la moyenne des rémunérations des dépôts vers le haut. La France se situe donc au-dessus du niveau de l'inflation et des moyennes européennes au niveau de la rémunération moyenne des dépôts.
Rémunération de l'ensemble des dépôts bancaires des ménages français > Europe #OER https://t.co/aM3ny8gN7w pic.twitter.com/GfItPMpFqp
- Banque de France (@banquedefrance) 7 juillet 2016
Cette bonne nouvelle pour les épargnants français n'en est pas forcément une pour l'économie. En effet, elle encourage le placement d'argent dans des actifs non risqués, ce que déplore la Banque de France. "Notre économie a besoin d'investissements risqués et aujourd'hui l'épargne est insuffisamment dirigée vers le financement d'investissement d'innovation ou de croissance", détaille le gouverneur. Ainsi, en 2015, seulement un tiers des placements des ménages ont été dans des actifs dits risqués.
Un appel à l'aide aux pouvoirs publics
Au lieu de s'attaquer à l'épargne réglementée du Livret A, la Banque de France appelle les pouvoirs publics et le marché financier à réfléchir sur de nouveaux produits d'épargne. Ces derniers auraient pour fonction de proposer des garanties aux épargnants sur le capital investi, tout en leur permettant d'investir en Bourse.
"L'euro-croissance amorce cela. Mais la profession doit pouvoir avoir une réflexion sur d'autres produits à long terme qui permettent de profiter des rendements élevés des actions à long terme et de répondre aux besoins d'épargne", explique le gouverneur de la Banque de France.
Néanmoins, l'épargne réglementée offre un véritable cadre attractif aux particuliers, qui n'incite pas aujourd'hui à une épargne davantage risquée. Le gouverneur doit désormais décider, la semaine prochaine, la baisse ou non du taux du Livret A, pour début août. Il a ainsi précisé qu'il ne souhaitait pas que la "fiscalité se traduise par une distorsion en faveur des produits non risqués".